mardi 29 mai 2007

Le temps des cerises

Ce jeudi 31 mai, cinq citoyens comparaîtront au tribunal de Grenoble.
Quel est leur « crime » ? Refus de prélèvement biologique.
Rappelons les faits : en mai 2003, ils ont démonté toutes les plaques nominatives de la rue Thiers de Grenoble pour les remplacer par d'autres intitulées « rue de la Commune de Paris » (*) d'où leur nom de « Contre-plaquistes ». Alors que leur intention n’était pas de s’approprier ces plaques, un premier procès les déclare coupables de « vol aggravé » mais les « dispense de peine ». Deux ans plus tard, ils sont convoqués au commissariat de police pour prélèvement biologique (en vue d’un fichage d’empreinte génétique). Ce qu'ils refusent. Nouveau procès et condamnation à une amende de 150 € avec sursis.
Ils font appel et c'est ce recours qui se tiendra le jeudi 31 mai.
Rappelons la loi. En 2001, création du Fichier National des Empreintes Génétiques. Les prélèvements ne concernent alors que les auteurs de crimes sexuels. La loi est rapidement étendue à tous les crimes graves, puis à la totalité des condamnés. De fil en aiguille, aujourd'hui, ce sont les suspects de tout délit qui peuvent se voir imposer ce prélèvement !*
Ce fichage généralisé et systématisé est absurde et dangereux. Il ne s'agit plus d'un outil de recherche des criminels mais de la mise en fiche de toute la population. L'informatisation de ces données qui permet, en dépit de la vigilance théorique de la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL), le croisement avec d'autres fichiers, peut laisser craindre les pires dérives vers une société totalitaire.

Les organisations soussignées* font part de leur entière solidarité avec les « Contre-plaquistes ». Elles appellent à les soutenir : Mercredi 30 mai, à 14 h, rue Félix-Poulat (Grenoble) : tenue d'un stand et distribution de tracts.* et Jeudi 31 mai - le jour du procès - place Firmin-Gautier à 13 h 30 : rassemblement pour les accompagner au tribunal.*
Organisations signataires de cet appel :* Antigone, ATTAC, Cercle Condorcet, CIIP, LDH, LIFPL, Ras l’front, Survie CGT, Confédération Paysanne, FSU, PAS, SE-UNSA, SNUipp-FSU, SUD-PTT, Les Alternatifs, GO Citoyenneté, LCR, PCF, PCOF, PS, Verts-Isère

(*) En février 1871, Adolphe Thiers, chef du gouvernement, accepte des conditions de paix très dures pour le peuple dans le conflit qui oppose la France à la Prusse. Le 18 mars 1871, alors que Paris est toujours assiégé par les armées de Bismarck, le gouvernement français tente de désarmer la Garde Nationale. Le peuple de Paris se soulève et la Commune de Paris, premier « gouvernement » à forte proportion d'élus ouvriers, est proclamée. Le gouvernement s’enfuit à Versailles. Le peuple parisien se retrouve maître de la capitale.
Pendant dix semaines, les « communards » tentent, dans des circonstances extrêmement difficiles, de réorganiser la société sur des bases entièrement nouvelles. Ainsi, la Commune de Paris innove dans le domaine social, l’organisation du travail, la laïcité, l’enseignement, la pratique de la démocratie et l’éventail des salaires.
Le 21 mai 1871, les troupes Versaillaises, menées par Adolphe Thiers, entrent dans Paris pour mettre fin à l’insurrection de la Commune. Débute alors la « semaine sanglante » du 21 au 28 mai 1871. La répression est féroce : 25 000 à 30 000 massacrés (dont femmes et enfants), 36 000 prisonniers, 4 586 déportés en Nouvelle-Calédonie.

Quelques précisions.
En préalable, bien faire la distinction entre le démontage des plaques de la rue Thiers et la tentative policière de fichage génétique.
*1°/ Le démontage des plaques de la rue Thiers dans la nuit du 16 au 17 mai 2003.*
a/ Après leur sinistre méfait suivi d’une garde à vue de 16 heures, les 8 malfrats auteurs de cette intolérable atteinte aux biens publics, ont distribué une lettre aux habitants de cette rue. La quasi-totalité ne savaient pas qui était le dénommé Thiers ! Rien d’étonnant quand les manuels scolaires n’abordent pratiquement pas cet épisode tragique de notre histoire.
b/ La municipalité de Grenoble a avancé l’argument consistant à dire qu’un changement de nom de rue apporterait des désagréments aux habitants de cette rue arguant qu’une place de La Commune existait déjà (c’est vrai). D’où la proposition de ces dangereux délinquants, après coup, de rebaptiser la rue du nom suivant : « Rue du Temps des cerises ».
*2°/ « Le fichier national automatisé des empreintes génétiques* »
En première instance, ces 8 citoyens ont été « reconnus coupables mais dispensés de peine » ! Surprenant jugement, mais passons. Deux après, en 2005, 7 d’entre eux (le huitième y ayant échappé) ont été sommés de se soumettre à un prélèvement biologique pour identification d’empreinte génétique (ADN). L’un, résidant alors à Lisieux a refusé et a été par la suite relaxé. Sur les 6 Grenoblois, l’un a accepté sous la pression de la police. Les 5 autres ont refusé et ont été condamnés à une « peine plancher » de 150 € avec sursis. *Pour le principe*, ils ont décidé de faire appel. Et c’est ce recours que soutien le comité de défense. Il s’avère en effet que la constitution d’un fichier national prévu à l’origine pour des délinquants sexuels s’étend maintenant à de très nombreux actes délictueux ou supposé tels (à l’exception d’abus de biens sociaux, par exemple…). Il suffit maintenant d’être suspecté de quoi que ce soit, placer en garde à vue pour le moindre fait, pour être contraint d’accepter un prélèvement biologique à des fins de fichage national. Monsieur Hortefeux (ministre aujourd’hui de je ne sais quoi) ne disait-il pas récemment qu’il faudrait prendre l’empreinte génétique des enfants dès leur naissance ?
Cette pratique du prélèvement biologique pour détermination de l’empreinte génétique se développe même au-delà de ce que prévoit le code pénal. La lecture des 2 articles ci-dessous le confirme.
C’est donc le combat que nous menons en exprimant notre solidarité aux 5 copains qui devront comparaître, en appel, le jeudi 31 mai (rendez-vous, 13 h 30, place Firmin-Gautier, à coté du tribunal).

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